Mon cheminement, mon parcours
Après avoir travaillé 6 mois en service hospitalier en pédiatrie, effectué de nombreux baby-sitting dès mon plus jeune âge, j’ai débuté mon travail en tant qu’infirmière en crèche en février 2020.
Mon cheminement a été long et je ne suis toujours pas une experte en neurosciences ni dans la relation adulte enfant (je ne sais pas si on peut le devenir un jour!). Mais ce que j’ai appris a totalement changé ma vision de « l’éducation » et ma relation avec les enfants, c’est pour cela que je souhaite vous partager mon expérience et mes connaissances.
Lorsque je suis arrivée dans les établissements d’accueil du jeune enfant, je me sentais dépassée, « dominée » par certains enfants de seulement 3 ans. Persuadée que je représentais l’autorité et qu’ils devaient m’écouter, je me suis souvent sentie démunie lorsque je demandais quelque chose à un enfant et qu’il me répondait « non ». J’ai alors tenté de lever la voix, et cela fonctionnait parfois.
Je suis arrivée pleine de croyances, je ne m’étais jamais vraiment questionnée sur « l’éducation » des enfants, je reproduisais simplement ce que j’avais vécu en tant qu’enfant, ce que je connaissais.
C’est au décours d’une conversation avec une collègue que j’ai pris conscience que j’élevais souvent la voix. S’en est suivi une ribambelle de questionnements sur mes pratiques.
Pourquoi lorsque tel enfant s’énerve je m’énerve avec lui et le laisse seul face à ses émotions ?
Pourquoi lorsque je lève la voix ils m’écoutent ? Et pourquoi devraient-ils m’écouter ?
Ces questionnements ont émergé juste avant le confinement de mars 2020, j’ai donc pu passer ce premier confinement à m’informer, à me remettre en question et à essayer de comprendre ce qu’il se passait en moi.
J’ai commencé par regarder cette conférence du docteur Catherine Gueguen sur le développement de l’enfant. Et c’est alors que j’ai compris.
Comment se développe le cerveau du tout petit ?
A la naissance, le cerveau du nouveau-né est totalement immature, il atteint sa pleine maturité à 25 ans. Il se développe au fur et à mesure et en fonction de son environnement, des expériences qu’il va vivre.
Le cerveau est constitué de trois grandes parties : le néocortex (cerveau du haut) le système limbique et le cerveau reptilien (cerveau du bas). Ce dernier est responsable des instincts (survie, fuite…). Le système limbique représente le centre des émotions et de la mémoire. le Néocortex représente les fonctions cognitives supérieures et concerne ainsi par exemple la perception, la stratégie, la pensée consciente ou encore le langage. Le néocortex permet également de réguler les émotions et de ne pas se laisser submerger par ses émotions.
Le cerveau du tout petit étant totalement immature, ces deux parties du cerveau ne se « touchent » pas. L’enfant ne peut donc pas contrôler la puissance des émotions qu’il peut ressentir, il hurle, se roule par terre, tape, non pas parce qu’il est violent mais parce que ce qu’il ressent est une véritable tempête émotionnelle et que son néocortex ne peut pas réguler son cerveau reptilien et le système limbique.
Voici une courte vidéo destinée à la base aux enfants pour comprendre simplement pourquoi ils n’arrivent pas à gérer leurs émotions, le cerveau étant représenté par la main :
Lorsque l’on sait cela, nous voyons les crises des enfants d’un œil complètement nouveau. C’est dans ces moments que les enfants ont en fait le plus besoin de nous, adultes.
Un phénomène entre en jeu lorsque nous voyons nos enfants ou même n’importe qui se mettre en colère. Il s’agit des neurones miroirs.
Qu’est ce qu’un neurone miroir ?
Les neurones miroirs sont une catégorie de neurones du cerveau qui présentent une activité aussi bien lorsqu’un individu exécute une action que lorsqu’il observe un autre individu (en particulier de son espèce) exécuter la même action, ou même lorsqu’il imagine une telle action, d’où le terme miroir. »
Si quelqu’un nous sourit, naturellement nous lui faisons un sourire. Si quelqu’un rit aux éclats, nous ne pouvons nous empêcher de rire avec lui. Par contre si quelqu’un se met en colère et crie, cela nous met directement en colère et peut nous gâcher une bonne partie de notre journée. Lorsqu’un enfant « pique une crise » subit une tempête émotionnelle, cela nous fait ressentir des émotions très désagréables. Mais comme nous sommes adulte, notre néocortex a la capacité de réguler nos émotions. A nous de prendre un instant pour respirer, se calmer, pour ensuite être disponible et accueillir les émotions de l’enfant.
Changer de regard sur l’éducation
Plus je me suis renseignée et plus mon comportement envers les enfants est devenu naturel et logique. Il est en effet impensable de se comporter envers des adultes comme nous le faisons envers les enfants. Les enfants sont vulnérables et totalement dépendant des adultes, nous leur enseignons par nos actes.
Alors oui, lorsque l’on élève la voix l’enfant va nous écouter, car il sera terrorisé. Mais élever nos enfants dans la peur c’est leur apprendre la loi du plus fort, la soumission, et ne pas les reconnaître en tant qu‘individu à part entière.
La punition elle n’apprend qu’une seule chose en fait… elle apprend seulement à éviter d’être puni » Marie Costa dans le podcast de papatriarcat.
Lorsque l’on envoie un enfant au coin, la seule chose à laquelle il va réfléchir c’est sur l’amour que nous lui portons. Si nous discutons avec lui, à sa hauteur, et tentons de lui faire prendre conscience de ses actes, là nous créons des connexions entre son cerveau supérieur et son cerveau inférieur et lui permettons de réfléchir. Un enfant n’est pas un adulte dans un corps d’enfant, il a besoin d’être accompagné et guidé.
Encore une fois, nous ne pouvons imaginer envoyer notre conjoint(e) « au coin » parce qu’il ou elle aura eu un comportement inadapté…
Et j’ajouterai une question à cette réflexion : lorsque vous ou votre entourage punissez un enfant, est-ce qu’il recommence ?
Le livre dont je parle dans ma bibliothèque « la discipline sans drame » donne quelques clés pour accompagner son enfant de manière sereine.
Je peux vous conseiller également le livre « 100 idées pour éviter les punitions » de Marie Costa.
Nous avons hérité des méthodes éducatives de nos ancêtres et cela fonctionnait alors pourquoi faire autrement ? « Mes parents m’ont donné des fessées et ça ne m’a pas fait de mal»
Parce que désormais de nombreuses études ont prouvé que les Violences dites éducatives ordinaires avaient un réel impact sur le développement cérébral du tout petit.
Les impacts du stress sur le cerveau
Lorsque nous sommes stressés, nous sécrétons une hormone appelée le cortisol. A trop haute dose, cette hormone est délétère pour le cerveau de l’enfant qui est malléable et immature.
Au contraire, l’ocytocine (hormone de l’amour, de la confiance et de l’attachement) va favoriser le bon développement du cerveau. L’ocytocine est sécrétée lors de contact physique, une douche bien chaude, l’accouchement, l’allaitement…
Validation des émotions
Nous avons souvent tendance à nier les émotions des enfants inconsciemment.
« Chut, ne pleure pas » « ça va, tu n’as rien »
Cela part d’un bon sentiment, mais cela donne le message à l’enfant que ses émotions ne sont pas reconnues, qu’il n’a pas le droit de ressentir des émotions « négatives » et plus tard il pourra se couper de ses émotions ou chercher à les enfouir grâce à certaines substances.
Les émotions dites « négatives » nous effraient, lorsque quelqu’un est triste nous ne savons comment réagir et la plupart du temps nous fuyons. La tristesse est pourtant une émotion saine et nous en avons besoin, comme toutes les autres d’ailleurs.
La plupart du temps, j’ai remarqué qu’en structure d’accueil lorsque l’on soulage un enfant en lui disant « ce n’est rien, ce n’est pas la peine de pleurer » ses larmes durent bien plus longtemps que lorsque nous reconnaissons la souffrance de l’enfant et mettons des mots dessus. Lorsque nous avons passé une mauvaise journée et que nous racontons cela à un(e) ami(e) ou à notre conjoint, nous avons besoin d’être écouté et reconnu dans notre peine.
Si cette personne nous répondait « ce n’est rien, tu en fais trop c’est bon » quel sentiment éprouverions-nous ?
La figure d’attachement
Pendant une journée d’école ou à la crèche, l’enfant doit tout d’abord rester assis une grosse partie de la journée et ne se dépense pas beaucoup. Ensuite, même si l’enfant est au contact la plupart du temps des mêmes personnes, il se contient et ne peut se montrer sous son « vrai visage » de peur d’être rejeté. A la maison, avec son ou ses figures d’attachement, il peut se permettre de relâcher la pression et de pleurer, crier, parce qu’il sait que ses parents l’aiment et seront toujours là pour lui.
C’est rassurant de se dire que s’il est un ange à la crèche et un démon à la maison, c’est parce qu’il vous aime et vous fait confiance, non ?
Cet article n’est absolument pas écrit dans le but de culpabiliser ou de montrer ce qui est bien ou mal. Je suis juste partie de mon expérience pour informer, parce que lorsque l’on est informé nous avons le choix. Et je ne l’étais pas jusqu’à il y a peu de temps. Je ne dis pas non plus que cela est facile, personne n’est parfait et tout le monde fait comme il le peut, j’en suis convaincue. Il y a des jours avec et des jours sans, des jours ou notre patience est mise à rude épreuve et où nous ne pouvons pas. Relayer lorsque nous le pouvons, prendre un tout petit temps pour soi peut permettre d’être plus disponible par la suite pour les enfants.
Thank you!!1